Noël à l’internat

« C’est une histoire ancienne, une histoire de classe. J’étais au ­troisième rang et lui au second, près de la porte d’entrée. Il était arrivé en ­septembre et parfois, quand il n’était pas occupé à écouter le cours, à tailler un crayon ou écrire la leçon, il jetait un regard complètement perdu autour de lui, comme s’il venait de sortir de l’avion et ne savait pas où il se trouvait. Aujourd’hui je pense, une éternité après, que ça m’aurait fait exactement la même chose. Je n’étais sans doute pas le seul à me dire ça, à son sujet. Il était un peu plus grand que nous et surtout, il ne portait pas les mêmes habits. Ses vêtements je n’aurais pu dire s’ils coûtaient plus ou moins d’argent que les nôtres. Ce n’était pas la question. C’était seulement qu’en le regardant, le nouveau, on se disait que ça n’allait pas le faire, qu’il ne resterait pas longtemps parmi nous. »

Nous sommes dans un internat de garçons au moment de Noël. L’un d’entre eux, Jo le noir, ne rentrera pas chez lui pour les fêtes. Il est saisi de désespoir, avant que la neige ne recouvre leurs préoccupations à tous.